HIVER 2003
CHRONIQUES de A à F



AENIMA - Never Fragile - CD - 6 titres - Equilibrium Music
Après un premier album remarqué en 1999, "Revolutions", cette formation portugaise revient sur le devant de la scène avec un mini album de 6 titres. La formation repose sur les épaules de leur chanteuse Carmen, qui réussit à créer une synthèse admirable des voix célestes des Cocteau Twins, de Speaking Silence et de The Gathering. Une musique tantôt aérienne et volatile (Lilith), parfois proche du gothique rock de Third and the Mortal (At the Edge of a Cliff) ou plus souvent côtoyant les rivages abyssaux d'une pop wave aux accents légèrement gothiques, aux guitares cristallines et à la basse plombée, très proche des travaux de Speaking Silence. Leur charme tombe légèrement lorsque les compositions deviennent, heureusement rarement, plus musclée, lorgnant disgracieusement vers les territoires lourdingues du rock gothique de Gathering et consorts, mais ces instants d'égarements étant très courts, on leur pardonne ainsi facilement ces errances. Reste un disque très honnête, excellemment produit, pour un groupe aux effluves éthérées très prometteur, digne d'une carrière internationale méritée.
Stéphane F.
Label : Equilibrium Music - Contact : Aenima


AI PHOENIX - Lean That Way Forever - CD - 10 titres - Glitterhouse Records
Ai Phoenix viennent de Norvège, un pays qui nous envoie depuis quelque temps déjà de plus en plus de formations talentueuses. Ai Phoenix exercent avec talent une pop intemporelle, ravivant les souvenirs les plus agréables de Young Marble Giant ou de Mazzy Star. "Lean That Way Forever" est leur troisième album, et de loin leur plus réussi et abouti. Une musique folk de grande qualité, des compositions soignées et épurées, une facilité d'écriture déconcertante, presque évidente. Leur musique rappelle les lointaines contrées arides des plaines désertiques, avec une aisance pop déconcertante, un peu comme si Belle and Sebastian avaient grandi dans les régions du far west américain. On pense donc à Mazzy Star, mais aussi à Mojave 3, à Sophia (ex- God Machine), Madrugada, Midnight Choir ou encore St-Thomas. Les titres s'imposent naturellement, à croire qu'on les connaissait déjà par cœur, avec simplicité et dénuement, sans brutalité aucune. La guitare caresse la voix chancelante du chanteur, et celle douce et embrumée de la chanteuse, note après note, avec un naturel cinglant. Ai Phoenix séduit là où Palace agace parfois, voulant trop sophistiquer ce qui n'a pas lieu de l'être. Un folk à mi-chemin entre les rêveries s ereines à la campagne et les sursauts urbains salutaires. La ville à la campagne, le rêve. L'album de la consécration pour cette formation norvégienne, sans aucun doute.
Stéphane F.
Label : Glitterhouse Records


AKIN - Verse - CD - Sacral Productions
Bien que je n'affectionne pas particulièrement ce genre, force est de constater que le goth métal des Français d'Akin a du charme et tient la route. Certainement pour les apports extérieurs aux influences précitées d'ailleurs. En effet, on retrouve autant de morceaux goth-métal que de passages atmosphériques, progressifs, voire même pop. Ajoutez à cela une instrumentation très variée, passant des éternelles guitares plombées à la guitare acoustiques, aux percussions plombées, puis subtiles, en passant par de délicats morceaux très réussis accompagnés à la flûte traversière. La subtilité vient également par l'apport important de l'électronique dans ces titres, mais également par la belle voix de la chanteuse, qui pourrait aisément se fondre au seins de formations heavenly voices ou ethno-rituelles. On retrouve les climats chers à Theatre of Tragedy, Paradise Lost, mais aussi Tiamat, Moonspell ou Anathema. Une production hexagonale qui, dans son genre, tient toutes ses promesses au niveau international.
Stéphane F.
Contact : Akin - Label : Sacral Productions


ALLERSEELEN - Knistern / Löwin - 7" - 2 titres - Aorta - 2003
Deux titres enregistrés en juin et août 2002 par les seuls soins de Gerhard sont présents sur ce nouveau 7" d'Allerseelen. 'Knistern' et sa mélodie mélancolique, presque lasse mêlée aux crépitements du feu, du vinyle... 'Löwin' et son atmosphère méditerranéenne, hivernale, aux sonorités voisines du 'Bist du die nacht' présent sur l'album 'Venezia'...
Une belle alchimie entre musique, érotisme et charme suggérés également par la peinture du Symboliste anglais L.W. Hawkins reproduite sur la pochette du disque... L'édition de ce 7" est limitée à 800 copies.
Recommandé!
Nathalie F.
Contact: Aorta


Bip-Hop Generation - Compilations vol. 3 & 4 - Bip-Hop
Voici les volumes 3 et 4 des la série Bip-Hop, de l'excellent label marseillais du même nom spécialisé dans la musique électronique expérimentale. Les volumes 1 et 2, déjà présentés dans les pages d'Heimdallr, ont familiarisé l'auditeur en quête de musique difficile pour personnes difficiles. Pourtant lorsqu'on y prête une attention plus particulière, cette musique n'est pas si difficile d'accès qu'il n'y paraît. Elle contient même une diversité et une richesse sonore impressionnante. Les compilations Bip-Hop constituent le moyen idéal pour se familiariser et découvrir un monde fascinant, insoupçonnable de premier abord, et pourtant si talentueux et luxuriant. Une source invulnérable pour se faire une idée de cette scène electronica digitale, et choisir ainsi ses diverses tendances, tant les artistes présentés diffèrent l'un de l'autre. Certes certains projets accrochent plus que d'autres, tout naturellement, et on retiendra de ces deux dernières compilations surtout les travaux de Si-Cut.Db, Twine et Vs_Price (pour le volume 4), et Atau Tanaka, Novel 23, Zonk't (projet de l'ex-Nox Laurent Perrier), Pimmon (déjà chroniqué en ces pages), Bovine Life et Neotropic. Une musique qui demande une attention particulière, qui s'écoute de l'intérieur, minimaliste, digitale, et pourtant si riche. Des paysages ambient, teintés d'electronica mélodique et expérimentale, d'où surgit une créativité bouillonante.
Stéphane F.
Label : Bip-Hop


CALL ME LORETTA - Scars
Call Me Loretta ont sorti leur première production il y a quelques mois, sous la forme d'un mini LP 6 titres, plein de charmes et de fraîcheur. Cette formation de Toulouse a su intégrer avec intelligence ses influences multiples pour ne garder que l'essence même d'une musique viscérale et émotive, sauvage et délicate. On pense de suite à nos premiers émois musicaux du genre en écoutant Jesus and Mary Chain, Teenage Fan Club, Sonic Youth, les Lemonheads ou My Bloody Valentine, pour ne citer qu'eux. Il y a quinze ans, Call Me Loretta auraient pu rejoindre l'écurie Creation, qui était encore un label d'exception (et dont les qualités ont fondu comme neige au soleil aujourd'hui ….). Des guitares tantôt énervées, tantôt maîtrisées et mélancoliques, un chant féminin torturé, fragile et crispé, des compositions reprenant fièrement le flambeau de la vague noisy pop, si chère aux Shoegazers que furent Ride, Lush ou les mythiques Pastels. La voix laisse penser aux cicatrices de Catpower, ainsi que certains titres d'ailleurs (Catching me Back). Les compositions n'ont pas à rougir face aux pointures anglo-saxonnes, et tiennent extrêmement bien la route, tel les excellents "Childish Dreamwish", "Voiceless Disillusion" ou "Vague à Larmes". Un excellent début, entre My Bloody Valentine et The Sea and the Cake, qui promet un avenir radieux. A défaut de se faire un nom, ils se sont déjà fait un prénom...
Fort prometteur, à découvrir d'urgence !
Stéphane F.
Contact : Call me Loretta


CAPRICE - Songs of Innocence and Experience - CD - 10 titres - Prikosnovénie
Lorsque leur premier disque est sorti il y a déjà deux ans, la surprise est venue de l'atmosphère si spéciale crée par cette formation russe à l'essence particulièrement atypique. Ils sortent leurs deuxième production, dans la droite ligne de la première, avec ce même souci de légèreté, d'évasion et de rêverie. Cette fois, le thème central s'articule autour de la poésie de William Blake, d'où le titre de l'album. On reste dans cette univers de conte de fée, de lutins caboteurs et de forêts enchanteresses. La voix si fragile d'Inna se marie à l'instrumentation très classique et précieuse de la formation, entre les soubresauts de la flûte et de la clarinette, et les envolées gracieuses du violoncelle et du violon. Curieusement, la poésie de Blake semble prendre vie au travers de la musique, les mots s'échappent et se matérialisent, entre mort et renaissance, ombre et lumière, le néant et la vie. Un album qui prend du temps à s'apprivoiser, qui surprend de premier abord, et qui dévoile ses charmes au fil des écoutes, pour s'imposer définitivement.
Une valeur sûre de la scène classique éthérée.
Stéphane F.
Label : Prikosnovénie - Contact : Caprice


DAEMONIA NYMPHE - s/t - CD - 9 titres - Prikosnovénie
Il aura fallu plusieurs longues années, en comptant avec le flair légendaire de Prikosnovénie, avant de découvrir en nos terres les doux arpèges de la formation grec Daemonia Nymphe, qui n'en est pas à sa première production. Pour ce disque, ils se sont adjoints les services de Nicholas Brass, un fameux créateur d'instruments grecs, qui leur a mis a disposition une vraie mine d'or afin de restituer au plus proche les sons de la Grèce Antique. Et le résultat est tout simplement merveilleux. Utilisant des instruments dont on n'a quasiment jamais entendu parler, comme des keras, seistro, krotala, varvitos, samviki et autres lyres, alliant à ces sonorités des percussions et des voix féminines et masculines, les musiciens de Daemonia Nymphe invitent au rêve, célébrant la Nature, les forces célestes, la mythologie, le chant de notre Terre nourricière, la bravoure ancestrale, les forces mystiques. Une musique qui puise ses racines dans notre inconscient, dans la source même de notre existence, au cœur de la vie. On peut retrouver cette atmosphère si typique sur certaines productions de Gor, d'Ataraxia ou d'Hagalaz Runedance, voir même parfois de Mari Boine. Une ode à la beauté de l'esprit et du corps, de l'imaginaire et de l'inconscient, un retour aux sources ancestrales des temps qui nous ont inexorablement construits, aussi fragiles et solides que soient ces racines.
Magnifique !
Stéphane F.
Label : Prikosnovénie


DENSE VISION SHRINE - Magic & Mystery - CD - 6 titres - Iris Light Records
L'artiste norvégien Karsten Hamre, qui officiait sous le nom de Penitent chez Cold Meat Industry (ainsi que chez Prophecy Productions et Memento Mori), décida il y a quelque temps de saborder cette entité pour mieux se concentrer sur son nouveau projet, Dense Vision Shrine. "Magic & Mystery", qui se situe dans une veine dark ambient prononcée, avec quelques incursions néo-classiques, reste inlassablement accroché aux textures longilignes sombres et désillusionnées. De longues nappes sonores enveloppent les quelques notes égarées, d'où émerge un semblant de rythme craintif, créant un climat propice aux relaxations de l'âme en mal de réflexions intenses et personnelles. Un album très calme, intense et profond, qui laisse surgir toutefois une force intrinsèque peu palpable au premier abord, mais qui engendre indéniablement un sursaut, s'immergeant pas à pas aux tréfonds de nos pensées obstruées. Un vague sentiment de quiétude mêlé à une oppression sous-jacente s'immerge et finalement s'estompe sur le dernier morceau, plus volatil et enjoué, libérant l'esprit, pour finalement s'envoler rejoindre les derniers cris furtifs des oiseaux , clôturant un album aussi serein que tendu, à l'élégance radieusement obscure.
Stéphane F.
Label : Iris Light Records


PAOLO DI CIOCCIO - I Sing the Voice Electric - theremin recital - CD - 12 titres - Videoradio
Musicien classique confirmé, Paolo Di Cioccio s'est petit à petit intéressé à d'autres formes musicales, par curiosité, par évolution dans sa carrière, recherchant inlassablement de nouvelles voies. C'est ainsi qu'en parallèle à la musique classique, il s'initie à la musique électronique, aux aléas de l'expérimentation et de l'improvisation, devenant rapidement, de par son expérience, une référence de taille. Sur cet album, outre son instrument fétiche qu'est le haut-bois, il a principalement utilisé le theremin, agrémenté de tribulations synthétiques et analogiques du meilleur effet. Une musique ambient et expérimentale, de longues plages étendues, embrumées et virevoltantes, ponctuées de soubresauts et d'ondulations rythmiques magistrales. Des intonations sculpturales, ciselées de main de maître, tel le vent dans les tréfonds désertiques des plaines givrées, tel l'appel irrésistible du chant des sirènes. Un disque profond et délicat, ruisselant d'insoupçonnables perles aériennes.
Stéphane F.


DJ ANTZ : TRINCEA - Si sta come di autonno sugli alberi le foglie - CD - 1 titre (48.13 minutes) - Myrddin edition
Antoine Indaco, alias Antz, s'est fait connaître en Suisse, puis dans plusieurs pays d'Europe, en tant que DJ dans différents clubs et festivals (WGT à Leipzig), mais aussi comme (ex-) cofondateur de Sanctuary et maintenant comme cofondateur de l'association Soleil Noir, créatrice d'événements. Immergé dans le monde de la musique depuis si longtemps, ce qui devait arriver arriva, il s'est ainsi mis à composer, nouvelle étape dans son cursus musical. Et là où on aurait pu penser qu'il se délecterait de sons darkfolk ou industriels, spécialement pour cet admirateur de Death In June, il nous propose une longue plage variée et subtile de sonorités électroniques, quelquefois dark-ambient, proche souvent des productions actuelles d'électronica, truffée de références cinématographiques, allant de Kusturica à H.G. Wells, en passant par Kieslowski et Scott. Certes les moyens d'enregistrement restent artisanaux, la production peine parfois à convaincre, mais Antz ne propose ici qu'un premier jet des ses élans créatifs, conscient du manque de moyens. Pourtant cette composition, qui peut aisément être découpée en plusieurs phases, révèle une potentialité évidente et prometteuse, passant des délicats sursauts d'electronica mélodieuse et répétitive (rappelant quelquefois Blink Twice), aux élans martiaux et guerriers, proche de Blutharsch ou Von Thronstahl, teintés de la garde de fer, ou encore aux expérimentations virevoltante sur fonds d'Adagio d'Albinoni. Une œuvre intéressante qui prendra de l'ampleur une fois recentrée sur l'essentiel, trouvant une voie au travers de ces multiples routes référencées. Trincea devrait normalement sortir un vinyl sur un petit label portugais, incluant une relecture du mythique Lili Marlen, accompagnée d'une chanteuse.
Prometteur. A découvrir !
Stéphane F.
Contact : www.soleilnoir.ch/antz


WERNER DURAND - The Art of Buzzing (Excuse the Delay vol. I) - CD - 6 titres - X-tract
Dans la plupart des traditions musicales dans le monde, les vibrations ou le bourdonnement d'un instrument font partie intégrante de l'instrument et surtout de la musique en elle-même. On retrouve ce phénomène avec les flûtes coréennes et chinoises, les instruments à cordes basques ou éthiopiens, ou encore avec certains instruments en Inde. Dans certaines cultures, il est dit que ces vibrations ressortent l'âme du son. Et c'est justement à ce phénomène que s'est intéressé l'artiste conceptuel allemand Werner Durand, en utilisant principalement des instruments à vent en pvc. Déjà dans les années 80, il se servait de flûtes traversières munies d'un vibrateur, il expérimenta moults techniques à l'aide d'un résonateur avec le percussionniste Pierre Berthet en 1991. Il s'essaya ensuite aux résonances de la clarinette, de la guitare, des percussions, toujours en utilisant cette même technique particulière.
Pour cet album, Durand enregistra chaque titre en multi-pistes, en utilisant des boucles sonores et en retravaillant le son original. Les principaux instruments utilisés sont donc des sortes de longues pipes en pvc, incluant le bec d'un saxophone. Chaque son est crée à la base avec une long tube en pvc, comme caisse de résonance, muni d'une membrane en plastique au bout pour créer ces vibrations. Parfois l'emploi d'un vase à fleurs fut sollicité comme caisse de résonance avec des assiettes pour remplacer la membrane en plastique.
Sans savoir tous ces détails, il est quasiment impossible de deviner la source de ces sons intenses. Musicalement, on se trouve face à de longues plages ambient puissantes et oppressives, cinglantes et rituelles. De vertigineux drones imposent une ambiance tendue, planante et glauques, baignée de fréquences sourdes et rocailleuses. Une ambiance d'apocalypse et de rituel païen sanglant.
Fort intéressant !
Stéphane F.
Label : X-tract


FEELINGS OF NOWHERE - Emotions - CD - 8 titres - Str8line
Nous avions reçu deux titres de Feelings of Nowhere il y a quelque temps déjà, et voilà logiquement leur premier véritable album, confirmant la qualité des morceaux déjà connus. On reste dans une veine électro-pop, largement influencée par les eighties, proche de formations comme Psyche, OMD ou Depeche Mode (à leurs débuts), de ce son new-wave si typique qu'ont adopté nombres de formations actuelles comme Mesh, Covenant, Wolfsheim ou VNV Nation. On retrouve avec plaisir les " hits " The Light ou Lemon Line, hymnes entêtant, ainsi que d'autre morceaux tout aussi réussis. Outre l'instrumentation nostalgique aux accents de notre prime jeunesse, écoutant Data Bank A ou I Scream, c'est la voix qui prime chez Feelings Of Nowhere, véritable clé de voûte de l'ensemble, à l'instar de formations comme Wolfsheim ou Deine Lakaien. Ceux qui aiment l'électro-pop aux accents new wave prononcés aimeront.
Stéphane F. Label : Str8line - Contact : http://feelingsofnowhere.free.fr


MARCOS FERNANDES - Hybrid Vigor - Accretions
Marcos Fernandes, percussionniste de renom, s'est établi depuis fort longtemps comme une personnalité incontournable au sein de la musique expérimentale et improvisée. Il est également le fondateur du label Accretions, une référence en la matière. Sur son dernier disque en date, il s'est entouré d'une impressionnante armada de tout ce que la musique expérimentale compte d'artistes innovants aux Etats-Unis. Ces musiciens ne cachent jamais leurs racines rock, jazz ou world music, au contraire, ils les exploitent pour mieux assouvir leurs tendances actuelles. " Hybrid Vigor " représente la synthèse de la vie de son auteur, né au Japon dans une communauté portugaise, élevé au catholicisme parmi les bouddhistes. L'œuvre reflète l'identité multiculturelle de Marcos Fernandes, sa vision élargie de notre monde transcrite en musique. Et cet exercice de style s'avérant particulièrement périlleux, Fernandes réussit l'intransigeant pari de marier différents styles pour aboutir en fin de compte à une œuvre sensible et homogène. Une musique ambient, ponctuée de rythmes répétitifs, discrets et précis, mettant en avant le caractère ethnique des compositions, sans jamais en faire un priorité, à l'instar de Temps Perdu ? pour ne citer qu'eux. Mais Marcos Fernandes reste toutefois beaucoup plus expérimental dans son travail, explorant autant le monde de l'improvisation, de l'ambient, du sound art, de l'avant-garde, et du minimalisme que l'univers du jazz et du collage sonore.
Un disque des plus aboutis pour qui veut s'initier à la richesse sonore d'artistes en constante mutation, à un univers parfois aussi déconcertant que fascinant.
Stéphane F.
Label : Accretions


FLËUR - Prikosnovénie - CD - 13 titres - Prikosnovénie
En russe, Prikosnovénie veut dire "douce caresse", il est d'un logique implacable de voir l'album de cette formation ukrainienne sortir sur le label culte français, non seulement pour son titre, mais également pour son obédience délicate et éthérée, qui reflète si bien Prikosnovénie. Flëur fut une des révéations du dernier sampler du label, et l'arrivée de leur album confirme notre première impression. Loin des clichés attribués au fil des ans aux formations du genre, Flëur impose d'entrée une personnalité intègre, tout au long d'un album pop mélancolique et gracieux, teinté de romantisme slave et de folk gracieux. Certes quelques comparaisons avec Bel Canto ou Cocteau Twins (Carrousel, A Sad Clown) ne sont pas fortuites, voire aux comptines douces-amères de Sophie Zelmani, et parfois la musique des Ukrainiens me fait curieusement penser, sur quelques morceaux, à certaines formations pop de qualité issues du catalogue du label espagnol Elefant Records. Une instrumentation riche et variée confère à l'album ses lettres de noblesse, intégrant la guitare acoustique, le violoncelle, le piano, la flûte, la basse et les percussions dans l'élaboration d'une musique savante et inspirée. Une atmosphère vivifiante émerge de cette musique aussi lumineuse qu'obscure, aussi douce que plaintive. Un conte de fée acide et sensuel, transcendant l'âme, idéal compagnon d'un automne bénéfique ou d'un printemps revigorant.
Magnifique !
Stéphane F.
Label : Prikosnovénie


Retour